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Page:Aicard - Maurin des Maures, 1908.djvu/442

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MAURIN DES MAURES

familier perchait nuit et jour au bord du hamac de son maître, et il se fortifiait d’heure en heure dans la connaissance du parler moco, qui est, comme vous savez, un patois provençal francisé, du plus haut ragoût.

« Le bateau passa un temps à Marseille, puis il arriva un beau soir dans le port marchand de Toulon.

« Le matelot, descendu à terre, croyant son perroquet plus apprivoisé qu’il n’était en réalité, négligeait souvent de le mettre en cage… Il le laissait libre dans sa chambre. Un matin, Coco s’envola.

« Son maître eut beau le suivre en criant : « Coco ! Coco ! » par petits bonds et par petits vols il s’éloignait toujours davantage.

« Quand la nuit vint, la poursuite fut abandonnée. Le lendemain Coco était arrivé sur les cimes boisées du Coudon, à quatre lieues de notre premier port militaire, à huit cents mètres au-dessus du niveau de la mer.

« De là Coco pouvait voir toute la Méditerranée au sud, sur sa tête le plus beau ciel du monde, et Draguignan du côté de l’est.

« Le surlendemain, dès la première pointe du jour, il s’envola vers le chef-lieu en récitant aux échos des montagnes son répertoire : fragments de romances, jurons de bord, mots salés du gaillard d’avant. Il déjeunait à toute minute d’une olive ou d’une amande, puis repartait d’un vol plus décidé vers les collines qui entourent Draguignan.

« Et voilà que le soir du troisième jour, un peu avant le coucher du soleil. Coco vint se percher sur le frêle amandier qui se dressait au bord de l’aire, à trente pas de la bastide de Marius-Sidoine Cabasse sur le coteau, au-dessus de Figanières.