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Page:Aicard - Maurin des Maures, 1908.djvu/91

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MAURIN DES MAURES

pieds. Vous êtes comme à la fenêtre au plus haut d’une maison. Ils remontent vers vous et, frrou, frrou ! vous les entendez contre votre oreille battre l’air, en sens contraire du vent. On est au milieu d’eux ! on croit voler avec eux ! Quand on reconnaît les ramiers, on se retourne, et pan ! ils tombent… Par devant ils portent le coup… Le plomb, par devant, glisse sur leur plume comme l’eau sur la poitrine d’un canard.

— Eh bien, Maurin, vous instruisez votre fils ?

C’était Cigalous.

— Oui, monsieur le maire. Dans chaque canton des Maures, j’ai des souvenirs. Je les lui conte. Je lui dis ce que je sais, mais il a besoin d’être instruit d’autre chose et c’est pour ça, comme je vous ai expliqué avant hier, que j’ai fait venir le petit par la diligence. Hier soir, je suis allé le recevoir, au passage de la voiture, à la cantine du Don. Nous avons couché chez des amis. Et nous voici prêts à rendre visite avec vous à ce brave M. Rinal.

Ce brave M. Rinal était un vieux chirurgien de la marine en retraite, très savant, très philanthrope, polyglotte et philosophe, qui, n’étant pas riche, avait choisi ce pays pour y vivre avec peu d’argent et y mourir en paix.

Maurin avait pensé que, vu la bonne mine du petit, le vieil officier de la marine consentirait à lui donner « un peu de leçons ». Des amis, chasseurs et bouchonniers, avaient promis, moyennant une certaine redevance, de loger, nourrir, soigner l’enfant, lequel d’ailleurs apprendrait le métier de leveur de liège et de bouchonnier. Et deux ou trois fois par semaine, le petit Bernard pourrait, si le vieux marin voulait de lui,