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Page:Aimard - Curumilla, 1860.djvu/40

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— Voici en deux mots, l’affaire. Le colonel Florès, dont, entre parenthèses, la figure ne me revient nullement, n’a fait que rôder dans la Mission depuis ce matin, furetant et regardant partout, s’informant de ce qu’on fait et de ce qu’on ne fait pas, jasant avec l’un et avec l’autre, et tâchant surtout de connaître l’opinion de nos hommes sur leur chef. Jusque-là, il n’y avait pas grand mal ; mais, aussitôt qu’il vous a vu vous endormir, il s’est assuré que le comte, occupé à écrire sa correspondance, avait défendu qu’on vînt le déranger, et pour quelques heures au moins, ne surveillerait pas ce qui se passe dans le campement ; il a feint de se retirer dans une case à demi ruinée, située sur la lisière de la Mission ; puis, au bout de quelques minutes, lorsqu’il a supposé que l’on ne songeait pas à lui, au lieu de dormir, ainsi qu’il l’avait annoncé, il est sorti de cette case en se glissant à travers les arbres, comme un homme qui craint d’être surpris, et il a disparu dans la forêt.

— Ah ! ah ! fit Valentin tout soucieux, quel intérêt cet homme a-t-il donc à s’absenter ainsi secrètement ? Et, ajouta-t-il au bout d’un instant, il y a longtemps qu’il est parti ?

— Dix minutes à peine.

Valentin se leva.

— Demeurez ici, dit-il ; au cas où le colonel reviendrait pendant mon absence, surveillez-le avec soin, sans cependant qu’il puisse se douter de quoi que ce soit. Je vous remercie de n’avoir pas hésité à m’éveiller. Le cas est grave.

Brisant alors brusquement l’entretien, le chasseur quitta don Cornelio, et contournant les ruines de