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Page:Aimard - La Grande flibuste, 1862.djvu/25

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Le lepero saisit les cartes d’une main tremblante d’émotion.

Il y eut un frémissement d’intérêt parmi les joueurs qui entouraient la table.

À ce moment, une fenêtre s’ouvrit à la maison devant laquelle Tio-Lucas avait établi son monté, et une ravissante jeune fille s’accouda négligemment sur le balcon en regardant d’un air distrait dans la rue.

L’étranger se tourna vers le balcon, et, se haussant sur ses étriers :

— Salut à la belle Anita, dit-il en ôtant son chapeau et saluant profondément,

La jeune fille rougit, lui lança un regard expressif sous ses longs cils de velours, mais elle ne répondit pas un seul mot.

— Vous avez perdu, seigneurie, dit le Tio-Lucas avec un accent joyeux qu’il ne put complètement dissimuler.

— Fort bien, répondit l’étranger sans même le regarder, fasciné qu’il était par la charmante apparition du balcon.

— Vous ne jouez plus ?

— Au contraire. Je double.

— Hein ? fit le banquier en reculant malgré lui d’un pas à cette proposition.

— Je me trompe, j’ai une autre proposition à vous faire.

— Laquelle, seigneurie ?

— Combien avez-vous là, fit-il en désignant la table d’un geste dédaigneux.

— Mais… au moins sept mille onces.

— Pas davantage ?… hum ! c’est peu.