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Page:Aimard - Le forestier.djvu/135

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Le Forestier

— Facilement, seulement le trajet est rade, je vous en avertis.

— Bah ! nous en avons vu bien d’autres, fit Michel.

— Que voulez-vous faire, señor ?

— Nous suivrons la ligne droite.

— Soit. Dans une heure nous partirons.

— Vers quelle heure arriverons-nous à la ville ?

— À quatre heures, au plus tard.

— Très bien, c’est ce que je désire ; connaissez-vous Panama ?

— Comme ce désert.

— Don Jésus m’a loué une maison où je veux me rendre directement.

— Laquelle ? don Jesus en possède trois en ville.

— Celle-ci se nomme la casa Florida.

— Don Jesus vous a loué la casa Florida ? s’écria le guide avec surprise.

— Oui. Que trouvez-vous d’étonnant à cela ?

— Rien, et beaucoup de choses.

— Je ne vous comprends pas.

— Il faut que cet homme soit fou, pour avoir consenti vous louer cette maison, ou qu’on l’ait soufflé pour le faire.

— Dans quel but ?

— Je l’ignore, mais dans tous les cas le conseil ne peut venir que d’un ami, et vous avez toutes espèces de raisons pour vous féliciter de cette affaire.

— Comment cela ?

— Aucune maison de Panama ne vous aurait convenu aussi bien que celle-là, par sa construction d’abord, et ses agencements intérieurs, qui ressemblent beaucoup à ceux de l’hacienda.

— Diable ! voilà que vous m’inquiétez, mon brave José.

— Pourquoi donc cela, señor ?

— Pardieu ! si je retombe dans des trappes et dans des cachettes, je ne serai plus maitre chez moi ; je serai entouré d’espions invisibles qui surveilleront mes mouvements, écouteront mes paroles, surprendront mes secrets ; de façon, en un mot, que je n’oserai plus faire un geste ni dire un mot, par crainte d’une trahison probable.

— Rassurez-vous, rien de tout cela n’arrivera ; deux hommes possédaient seuls les secrets de cette maison celui qui l’a fait construire, mais celui-là est mort.

— Et l’autre ?

— L’autre ? c’est moi.

— Ah bah ! quelle bonne plaisanterie, s’écria Miguel.