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Page:Aimard - Les Francs-tireurs, 1866.djvu/279

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LES FRANCS TIREURS.

— Et si je refuse ?

— Vous ne refuserez pas.

— Pour quelle raison ?

— Parce que vous êtes furieux contre moi, et que vous espérez vous venger un jour.

— Parfaitement raisonné, mais supposez que je refuse ?

— Alors, je vous ferai à vous et aux vôtres juste ce que vous vouliez me faire à moi et aux miens.

— C’est-à-dire ?

— Que vous serez tous fusillés dans un quart d’heure.

Il y eut un silence funèbre.

On n’entendait d’autre bruit que celui sec et monotone produit par l’échappement de la pendule. Ces hommes, réunis sans se voir dans un si petit espace, sentaient leur cœur battre à briser leur poitrine ; ils frémissaient d’une rage impuissante, car ils reconnaissaient qu’ils étaient bien réellement aux mains d’un ennemi implacable contre lequel toute lutte était sinon impossible, du moins insensée.

— Vive Dios ! s’écria le colonel, mieux vaut mourir que de se rendre ainsi.

Et il s’élança l’épée haute.

Une main de fer s’abattit sur lui, le renversa, et il sentit la pointe de sa propre épée, que dans sa chute il avait laissée échapper, lui piquer la gorge.

— Rendez-vous ou vous êtes mort ! cria une voix rude à son oreille.

— Non, mil demonios ! reprit le colonel avec rage, je ne me rendrai pas à un bandit : tuez-moi.

— Arrêtez, dit le Jaguar, je le veux.