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Page:Aimard - Les Peaux-Rouges de Paris.djvu/211

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Tout à coup, la main de Bernardo glissa sur l’épaule de Julian.

— Adieu ! adieu ! murmura le jeune homme.

Une lame passa sur sa tête ; il coula.

Une douleur horrible mordit Julian au cœur.

— Oh ! mon seul ami ! s’écria-t-il avec désespoir.

Il jeta à travers l’espace un de ces cris particuliers aux marins, et qui, comme ceux des montagnards, s’entendent à des distances énormes, au-dessus des sifflements de la tempête, et il plongea à l’endroit même où Bernardo avait coulé.

Deux fois, Julian revint sur le sommet des lames, ramenant son ami.

Mais celui-ci, à demi asphyxié, n’avait plus conscience de ses actes ; poussé par l’instinct de la conservation, il s’était cramponné au jeune homme dont il paralysait, sans le savoir, les mouvements.

Julian reparut une troisième fois.

Il jeta un cri strident, de désespoir et d’appel, et coula, sans doute pour ne plus reparaître cette fois, car ses forces étaient complètement épuisées.

Mais, au même instant, le canot apparut, un homme plongea, se glissa sous les deux corps entrelacés, les souleva jusqu’au sommet des lames où des bras les saisirent et les hissèrent complètement évanouis dans l’embarcation du brick.

Le fanal fut aussitôt éteint, et le canot demeura immobile, perdu dans les ténèbres.

La frégate passa presque à le ranger sans l’apercevoir, tant la nuit était sombre, et s’enfonça de nouveau dans l’obscurité où elle disparut.

Dix minutes plus tard, les deux fugitifs, toujours évanouis, étaient hissés à bord du brick qui orientait immédiatement ses voiles, et mettait le cap sur la Terre-de-Feu.

Après trois heures de recherches vaines, la frégate reprit sa route.

Deux actes de décès furent dressés par le commissaire,