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Page:Aimard - Les Peaux-Rouges de Paris.djvu/57

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s’il s’obstine à recommencer une nouvelle lutte, je le tuerai.

Les témoins frémirent, car l’accent avec lequel parlait le jeune homme prouvait qu’il le ferait comme il le disait.

Mais Felitz était hors de combat. Quand il l’aurait voulu, il lui aurait été matériellement impossible de recommencer la lutte.

Il était dans un état déplorable. Il avait le crâne ouvert, la tête horriblement gonflée, le nez écrasé, plusieurs dents cassées, l’épaule droite démise, l’estomac complètement déformé, une jambe luxée et un poignet foulé.

Dans de telles conditions, tout combat devenait impossible ; Felitz lui-même, rappelé à la vie par ses témoins, fut contraint d’en convenir.

— C’est bien, dit alors le jeune homme, tu te reconnais vaincu ; je n’abuserai pas de ma victoire ; surtout que ce qui s’est passé te serve de leçon ! Tu as abusé de ta force pour te faire le tyran de tous ceux qui étaient plus faibles que toi ; tu ne m’as cherché querelle à moi-même que parce que tu croyais avoir facilement raison de moi, dont la force est bien inférieure à la tienne ; rentre en toi-même, dompte ton orgueil, et surtout prends bien garde, à l’avenir, de t’attaquer à moi où à ceux que j’aime ; et, tu le sais, tous les habitants de ce pays sont mes amis. Je les défendrai contre toi. À présent, tiens jusqu’au bout les conditions convenues, en prononçant à voix haute les paroles arrêtées avant le combat.

— Oh ! murmura-t-il avec un rugissement de rage.

— N’hésite pas, reprit Julian, ou sur mon âme, je te le jure, nous partirons en t’abandonnant ici comme une bête fauve aux abois.

— Toutes les conditions doivent être remplies, dit nettement Bernardo, sans cela rien de fait ; nous partons en te laissant ici.

— Oui, répétèrent les autres témoins, il faut qu’il parle !

— Oh ! je me vengerai murmura-t-il d’une voix basse et inarticulée.

— Que dis-tu ? demanda Bernardo.