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Page:Aimard - Les Peaux-Rouges de Paris II.djvu/273

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— Tu me connais ? dit-il.

— Faut croire, reprit l’autre, en lui servant de la gibelotte ; aimes-tu la tête ?

— Un peu ; donne toujours pour voir si c’est un lapin de gouttière. C’est drôle, j’ai beau chercher, vrai ! je n’te reconnais pas.

— Quand je t’aurai vu encore une fois, ça fera deux, mon homme.

— Alors, comment que tu me connais ?

— Qué que ça t’fait, malin ?

— Dam ! il me semble…

— Dis pas de bêtises, nous avons à parler d’affaires, interrompit nettement l’autre.

— Ah ! ah ! voyez-vous ça ? fit Polyte avec méfiance ; et quelles affaires donc, mon p’tit ?

— Allons, flanche pas, Fil-en-Quatre ; est-ce que tu vas me prendre pour une mouche, à c’t’heure ?

— Bédame ! quand on ne connaît pas les gens…

— Tu es un sinve ; à ta santé !

— À la tienne ; et puis ?

— Et puis, reprit l’autre en posant son verre vide sur la table, ce matin, quelqu’un que t’as rencontré à Grenelle, et dont je n’ai pas besoin de te répéter le nom, t’a dit : « Va ce soir chez la Marlouze, il y a un poupon gras ; on te demandera : Les cerises sont-elles mûres ? »

— Et je répondrai, s’écria tout à coup Fil-en-Quatre : « Elles sont si mûres, qu’elles vont tomber des branches. »

— C’est ça même, mais parle plus bas ; mets une sourdine à ton galoubet.

— Bah ! il y a pas d’soin ; regarde, nous sommes seuls.

— C’est vrai, c’est pas malheureux !

Pendant que tout en mangeant les deux hommes avaient, à demi-voix, cet intéressant entretien, les autres consommateurs s’étaient retirés les uns après les autres.

— Ah ! ça, t’es donc le Loupeur ? demanda Fil-en-Quatre.

— Pour te servir, répondit le Loupeur, puisque tel est