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Page:Aimard - Les Peaux-Rouges de Paris II.djvu/294

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— Foi de Loupeur ! dit le rôdeur de barrières avec un sérieux ironique.

M. Romieux fit une atroce grimace ; mais il était trop avancé maintenant pour reculer.

Il n’osa même pas relever ce que le serment du Loupeur avait d’étrange.

— Maintenant, reprit celui-ci en allumant un second cigare, nous disons cinq cents, n’est-ce pas ?

— Va pour cinq cents, mais dans les conditions que je vous ai posées ?

— Des diables incarnés ! Je vous réponds d’eux, passons donc au chiffre.

— Quel chiffre ?

— L’argent, donc, ne le savez-vous pas ? Supposiez-vous par hasard, que je travaillerais pour l’amour de l’art ? fit-il en riant.

— Ah ! c’est juste, je n’y songeais pas. Mais je dois d’abord vous avertir que j’ai moi-même enrôlé un certain nombre d’hommes.

— Je le sais ; voyons votre liste.

— Pourquoi faire ?

— Combien sont-ils, d’abord ?

— Quatre-vingts ; ce sera autant à défalquer.

— Halte-là ! cher monsieur, je ne réponds que des hommes que je connais bien, et que, pour des raisons à moi connues, je tiens sous ma main.

Le manchot retira de très mauvaise grâce une longue liste d’un tiroir de son bureau, et il la présenta au Loupeur avec une visible hésitation, dont celui-ci ne fit que rire.

Il la lui prit des mains, s’approcha de la lampe et lut les noms des bandits avec une sérieuse attention.

De temps en temps, il s’arrêtait en grommelant entre ses dents des mots que l’autre ne comprenait pas, et il marquait certains noms d’un coup d’ongle.

Enfin il rendit la liste à M. Romieux qui, pendant que le Loupeur lisait, ne l’avait pas quitté de l’œil une seconde, bien qu’il feignît une profonde indifférence.