Aller au contenu

Page:Aimard - Les Peaux-Rouges de Paris II.djvu/349

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

c’est dans un de ces quartiers que je suis allé, tout droit. J’étais bien inspiré ; au bout d’une heure, j’avais trouvé ce que je cherchais : une vieille maison située entre cour et jardin, noyée pour ainsi dire sous les hautes futaies, impossible à deviner du dehors, et semblant faite tout exprès pour ce que monsieur en veut faire. Le propriétaire m’a dit que c’était une petite maison qui avait appartenu, il y a bien longtemps, au duc de Bellegarde ; je n’ai pas compris ce que cet homme voulait dire avec sa petite maison, car elle est grande, admirablement disposée, et à l’intérieur c’est un véritable palais : ce n’est que marbres, glaces, dorures et peintures ; il y a un jardin d’hiver, des communs séparés de la maison, écuries et remises, enfin tout ce qu’il faut ; sans comparaison, c’est presque aussi beau qu’ici ; seulement, les appartements sont plus petits, et du dehors ça a l’air d’une bicoque. Le propriétaire m’a dit que c’était fait exprès, et que les murs de clôture ont été surélevés afin qu’on ne pût rien voir du dehors : comprenez-vous, monsieur ?

— Parfaitement, mon ami, j’espère que tu n’as pas hésité, et que tu as acheté ce bijou ?

— Oui, monsieur, il paraît que le propriétaire est très gêné, et que c’est pour cela qu’il voulait vendre ; il a l’air d’un brave homme, cela lui déchirait le cœur de se séparer de sa maison : figurez-vous qu’il habite les communs pour ne pas abîmer les meubles, qu’il passe son temps à brosser et à essuyer.

— Comment ! la maison est meublée ?

— Oui, monsieur, mais ce sont tous des meubles anciens, et je ne sais pas si j’ai eu raison de les avoir achetés aussi, mais le propriétaire a insisté ; il ne voulait vendre que le tout ensemble. La maison me plaisait ; elle me semblait remplir les conditions exigées par monsieur ; de plus, le temps me pressait : ma foi, je me suis laisse aller, espérant que monsieur me pardonnerait.

— Tu as très bien fait, au contraire ; je t’en aurais voulu de laisser échapper cette occasion unique.

— Alors, tout va bien ; le propriétaire était pressé, lui