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Page:Aimard - Les Peaux-Rouges de Paris II.djvu/382

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ils nous poursuivront a outrance, j’en suis certain, par tous les moyens en leur pouvoir ; mais jamais ils n’accepteront le concours de la police ; ils prétendront agir seuls sans aucune aide, autre que leur courage, leur habileté et leur adresse ; ce qui déjà sera très embarrassant pour nous. La guerre que nous leur voulons faire, ils nous la feront ; ce sera un duel mortel, une lutte sans merci, de ruse et de finesse, je l’admets, mais pas autre chose. Je ne saurais vous prouver mon dire, mais j’ai la conviction qu’il en sera ainsi.

— J’ai de la peine à croire qu’ils tiendront cette conduite.

— Ce sera comme cela, cependant ; vous le verrez.

— Entre nous, c’est de la sottise. Quand on tient ses ennemis comme ils nous tiennent sans doute, on doit les écraser sous le talon de sa botte ; quant à moi, j’agirais ainsi.

— C’est possible, chacun a sa nature ; eux, ils n’auront même pas la pensée de nous dénoncer.

— Oh ! oh ! vous allez bien loin.

— Nous sommes en vendetta, comme disent les Corses ; ils nous combattront loyalement, avec les armes qu’ils ont entre les mains, sans même songer à en trouver d’autres.

— Hum ! cela est bien étonnant.

— Non, donné le caractère de ces deux hommes, c’est au contraire rigoureusement logique ; à moins d’être un lâche, on ne charge pas la police de venger ses injures. Ceci posé, quoi qu’il arrive, je resterai ; quant à vous, vous êtes libre de renoncer à votre chère Denizà et à la vengeance que vous vous promettez depuis si longtemps et que, je vois, vous n’obtiendrez jamais, grâce à votre prudence, ajouta-t-il avec une mordante ironie.

Felitz Oyandi tressaillit sous ce coup de fouet si rudement asséné.

Son regard lança un fulgurant éclair et regardant le Mayor bien en face :

— Soit, dit-il, d’une voix heurtée, je resterai ; mais