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Page:Aimard - Les Peaux-Rouges de Paris II.djvu/387

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— C’est juste ; je vous ai raconté comment, la nuit que vous savez, après de nombreux efforts, j’avais presque réussi à m’échapper, lorsque deux horribles molosses m’avaient assailli à l’improviste, et m’auraient dévoré si le Cœur-Sombre et La Framboise lui-même ne m’avaient pas retiré, pantelant et à demi-mort, de leurs furieuses étreintes.

— Oui, je sais cela.

— Mais ce que vous ignorez, c’est la vengeance que je tirai de ces affreux molosses ?

— J’ai entendu dire vaguement, que La Framboise avait péri ainsi que sa famille dans un incendie.

— Cet incendie avait été allumé par moi ; je n’en voulais pas à La Framboise, ni aux siens ; il m’avait soigné pendant plusieurs mois avec un dévouement que je me plais à reconnaître. Lorsque je fus rétabli de mes blessures, il me donna des armes, des vivres et un cheval, c’était bien ; je n’avais donc aucun motif de haine contre lui ; mais j’avais juré de tuer les chiens ; pour y réussir, il me fallait brûler la hutte, car jamais je ne me serais hasardé à portée de leurs redoutables mâchoires.

— Mort-diable ! et pour vous débarrasser des molosses, vous avez brûlé le nid et rôti toute la couvée ?

— C’était une terrible nécessité ; j’hésitai bien longtemps, mais j’avais juré.

— Et un galant homme n’a que sa parole, fit le Mayor en riant ; et combien étiez-vous pour ce chef-d’œuvre ?

— J’étais seul ; si j’avais eu des complices, ils auraient parlé, et je voulais que cette affaire demeurât toujours à l’état d’énigme indéchiffrable.

— Et vous avez parfaitement réussi ; mille diables ! vous êtes un rude homme. Nous étions bien faits pour nous entendre. Je n’aurais pas mieux fait, moi qui m’en pique ; recevez mes sincères compliments. Cela me donne bon espoir pour notre affaire ; je vois avec plaisir qu’au besoin vous savez être homme d’action ; tant mieux ! car peut-être serons-nous obligés de mettre les mains à la pâte. Mais continuez : je ne comprends pas encore bien