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Page:Aimard - Les Peaux-Rouges de Paris III.djvu/113

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cinq minutes, je suis à vous, et nous partirons, et malheur à ceux qui essaieront de nous barrer le passage !

— Quant à moi, je ne les manquerai pas, dit le chasseur d’un ton de sourde menace.

Bernard passa dans sa chambre à coucher, remit sa redingote en un tour de main, s’arma de deux revolvers Devisme à six coups, cacha dans la poche intérieure de son gilet un court poignard à lame bleuâtre et fine comme une aiguille et jeta son manteau sur ses épaules.

Puis, par un cabinet de toilette, il entra dans la chambre de sa femme ; celle-ci l’attendait, assise auprès du berceau de son fils endormi.

Mariette se leva en apercevant son mari.

Elle avait tout entendu.

— Je connais l’affreuse nouvelle que tu as reçue, cher Bernard, lui dit-elle avec tristesse, mais avec fermeté : l’honneur et l’amitié exigent que tu partes tout de suite.

— Je connaissais à l’avance la réponse que tu me ferais, chère femme, répondit-il en l’embrassant ; aussi, tu le vois, je m’étais déjà préparé.

— Veux-tu que je t’accompagne ? lui demanda-t-elle doucement.

— Pour rien au monde, ma chérie ! s’écria-t-il vivement ; j’exige, au contraire, que tu restes ici.

— Que ta volonté soit faite, mon ami ; j’obéirai, murmura la jeune femme, les yeux pleins de larmes. Malheureuse comtesse ! pauvre Vanda ! ajouta-t-elle.

— Bon courage, ma chère ; nous la sauverons, je l’espère. Demain, je serai ici de bonne heure. S’il m’était impossible de revenir, je t’enverrais chercher, ainsi que ton fils. Je crois que pendant quelque temps il sera préférable que tu habites l’hôtel d’Hérigoyen ; ce quartier-ci est beaucoup trop éloigné du centre.

— Mais toi, cher Bernard ?

— Je serai près de toi, sois donc tranquille ; maintenant, adieu ! Ne te mets pas martel en tête à propos de moi, et à demain. Prie pour nos amis, si affreusement frappés…