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Page:Aimard - Les Peaux-Rouges de Paris III.djvu/181

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Les visiteurs traversèrent les trois premières pièces sans s’y arrêter.

Ces pièces étaient dans le plus grand ordre ; ils ouvrirent la porte de la chambre à coucher, et, malgré eux, ils demeurèrent quelques instants immobiles sur le seuil, saisis d’admiration et presque de respect.

C’était bien là véritablement la chambre à coucher d’une jeune fille chaste et pure, dont les idées ne se sont pas encore égarées sur le monde, et dont le sommeil, calme et sans rêves décevants, doit faire sourire les anges.

Tout dans cette chambre, ou plutôt dans ce nid délicieux, était frais, parfumé, ravissant de candeur et d’innocence, rempli de ces mièvreries enfantines, si touchantes, qui marquent la transition entre l’enfant et la jeune fille, et rappellent les souvenirs si doux des premières années, pieusement conservé.

Tout était rangé et disposé avec un soin parcimonieux de pensionnaire. Les clefs étaient à tous les meubles ; les tiroirs regorgeaient de linge, de dentelles, etc., etc. Des bijoux d’un grand prix, bagues, boucles d’oreilles, agrafes, étaient posés dans des coupes en agate, sur la cheminée. Sur le dossier d’un fauteuil était négligemment jetée une écharpe de fichu, que sans doute la jeune fille avait quittée au moment de sortir.

Julian et Bernard, avec leur nature droite et loyale, subissaient, sans même essayer de s’en défendre, l’influence toute-puissante de ce chaste gynécée de jeune fille.

Le policier lui-même se surprenait, malgré ses brutales théories, à sentir son cœur, qu’il croyait mort à toute émotion généreuse, battre doucement dans sa poitrine. Surpris de cette émotion, si en dehors de ses habitudes, il jetait des regards effarés autour de lui.

Il tourmentait son binocle, son nez de fouine avait des titillements nerveux.

Julian et Bernard avaient tout à coup senti s’évanouir leurs soupçons à la vue de cette chambre virginale.

— Sur ma foi de Dieu ! s’écria Bernard avec émotion, nous