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Page:Aimard - Par mer et par terre : le batard.djvu/289

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me direz tout, je le veux : un frère n’a pas de secrets pour sa sœur.

— À quoi bon vous faire le récit de mes douleurs, chère sœur ! votre âme n’est-elle pas assez torturée par vos propres chagrins ?

— Mon frère, je veux connaître votre vie passée, je veux partager vos douleurs, comme vous partagez maintenant les miennes ; étant deux à souffrir, nous serons plus forts pour soutenir la lutte, ajouta-t-elle avec un délicieux sourire.

— Santa, vous êtes un ange. Oui, je vous dirai tout ; ressusciterai par la pensée l’ange que j’ai perdu et que vous auriez tant aimé ; vous lui ressemblez, Santa, vos deux âmes étaient sœurs ; quand vous connaîtrez sa triste histoire, vous l’aimerez. Lorsque vous me verrez dans mes heures sombres, vous me parlerez d’elle, vous prononcerez son nom, et le sourire reviendra sur mes lèvres à ce souvenir adoré doucement invoqué par vous.

— Oui, mon frère, nous parlerons d’elle ; nous oublierons le présent en nous réfugiant dans le passé. Merci, mon frère, de cette touchante confiance que vous mettez en moi.

En ce moment, les voitures tournèrent dans un chemin, escaladant les flancs des collines, et, laissant la ville sur la gauche, elles gravirent les pentes assez raides sans ralentir leur allure.

En Espagne les voitures galopent toujours, pour monter comme pour descendre ; les mules semblent endiablées, rien ne les arrête.

Quelques minutes plus tard, les voitures franchirent les grilles ouvertes d’une délicieuse villa, et, après avoir exécuté une courbe savante, elles vinrent s’arrêter devant un double perron de