Aller au contenu

Page:Aimard - Par mer et par terre : le batard.djvu/360

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Il baisa pieusement le vieillard au front, et, ouvrant une porte latérale :

— Entrez, mon révérend, dit-il à un moine dominicain déjà âgé et cassé par les rigueurs d’une vie austère, qui, agenouillé sur un prie-Dieu, priait avec ferveur ; entrez, mon père désire vous entretenir.

Le vénérable moine se releva, fit un salut respectueux et pénétra dans la chambre à coucher du duc de Salaberry, dont il referma derrière lui la porte.

Au dehors, l’orage redoublait, les éclairs se succédaient sans interruption ; le vent faisait entendre dans les corridors des sifflements lugubres, ressemblant à des plaintes humaines ; le tonnerre grondait et éclatait avec un fracas épouvantable.

Les enfants, éveillés pendant leur premier sommeil, ne comprenaient rien à ce qui se passait ; ils se serraient craintivement autour de leur oncle et de leur gouverneur, qui essayaient en vain de les rassurer.

Deux heures s’écoulèrent ainsi, heures sinistres d’une longueur interminable, pendant lesquelles on n’entendit d’autre bruit que celui de l’ouragan, dont la force allait toujours croissant et se changeait en une véritable tourmente.

Enfin, la chambre à coucher du duc s’ouvrit lentement : le dominicain reparut, plus triste, plus sombre, plus courbé qu’il ne l’était deux heures auparavant.

Il indiqua d’un geste au marquis la chambre à coucher du duc, rentra dans l’oratoire et alla, sans prononcer une parole, s’agenouiller de nouveau devant le prie-Dieu.