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Page:Aimard - Par mer et par terre : le batard.djvu/9

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qui lui arrive d’heureux l’épouvante, parce que, n’y étant pas accoutumé, il n’ose y croire.

L’anecdote de Polycrate, tyran de Samos ; jetant son anneau à la mer pour payer la rançon de son bonheur à l’adversité, est plus vraie qu’on ne le suppose. Les anciens sont nos maîtres ; rien ne leur a échappé, ils ont tout deviné et tout compris ; voilà pourquoi leurs deux plus puissants dieux étaient le Destin et la Fatalité.

Ces dieux, que l’on croit oubliés, existent encore, surtout pour la grande famille des parias de notre société, dédaigneusement rejetés par elle et placés, par l’irrégularité de leur naissance, hors de la loi commune et dans une situation identique à celle de notre héros.

Nous ajouterons, entre parenthèse, que si, au lieu d’être une histoire vraie, ce récit était un roman, il nous aurait été facile de faire d’Olivier Madray un homme hors ligne, un génie incompris ; d’entasser autour de lui des aventures plus extraordinaires les unes sur les autres, et de précipiter les péripéties : nous ne l’avons pas voulu ; nous nous bornerons, jusqu’à la dernière page, à ne dire que la vérité, tout en ne disant pas toute cette vérité, non pas que nous ayons quoi que ce soit à redouter, mais seulement par des motifs de haute convenance, dont les intéressés surtout nous sauront gré, nous l’espérons.

Cela dit une fois pour toutes, nous reprenons notre récit.

Pendant ces quatre années, bien des événements s’accomplirent, bien des faits se passèrent auxquels nos personnages se trouvèrent mêlés, plus ou moins directement.