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Page:Alain - Le Citoyen contre les pouvoirs, 1926.djvu/76

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LE CITOYEN CONTRE LES POUVOIRS

par les plus faibles et par les plus vieux, qui sont naturellement portés à douter de l’Espèce. Ainsi les jeunes et les forts sont mis en demeure de fournir la preuve, qui est bonne pour eux-mêmes aussi.

L’Art Militaire donne quelque sentiment de la Cérémonie véritable par des Cérémonies préparatoires, qui font déjà sentir à l’Homme, par l’action et le spectacle, qu’Il est plus courageux qu’il ne croit.

Si quelque peuple doute de son voisin jusqu’à le mépriser en parole et en action, il doit se prêter à l’Épreuve. Plus il est supposé courageux et fort, plus l’Épreuve est bonne. L’Estime pour l’ennemi est le sel de la guerre.

La Victoire termine l’Épreuve ; mais l’épreuve est bonne aussi pour le vaincu, dès que la guerre a été aussi longue et meurtrière qu’on pouvait l’attendre. Les deux adversaires sont réhabilités.

Par ces raisons, tous les hommes dignes du nom d’homme courent à la guerre au premier appel, quelle que soit leur opinion sur la Guerre.

L’Art militaire exerce sa contrainte sur tous. Tous la subissent impatiemment, mais viennent toujours à la célébrer comme un bien, lorsqu’ils songent aux vertus étonnantes et aux actions difficiles où la contrainte les a conduits.

L’Honneur est ainsi le véritable ressort des guerres ; ce qui ne laisse qu’un faible espoir aux amis de la Paix. Toutefois, comme les guerres ne se produisent que par la double préparation des Politiques et des Grands Chefs, que l’ambition pousse et que la gloire attire, ce serait un important résultat, et peut-être décisif, si le tribunal d’honneur, qui est

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