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Page:Alain - Le Citoyen contre les pouvoirs, 1926.djvu/95

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LES HYPOCRISIES DE LA GUERRE

pital, à ces tombes serrées et innombrables. Soyons dix au moins, pour l’honneur de l’espèce, à nous détourner de ces monuments hypocrites, et à demander un peu de pudeur seulement. Que les promesses ne soient point violées, car comment se délier d’une promesse aux morts ; que le désir de faire argent de tous ces cadavres ne vienne pas du moins le premier en nos pensées, mais que la volonté de paix marche la première. Je ne voudrais même pas avoir à dire que vous y gagnerez, quoi qu’il soit vrai pourtant que tout ce que nous obtiendrons par force soit comme rien en regard de ce que coûtera l’autre guerre, à laquelle vous allez, à laquelle il ne manque qu’un adversaire armé ; à cela près nous la voulons et nous la faisons. Mais est-ce le même homme ? Ou ne faut-il point dire qu’en cette guerre toute notre vertu est morte, hélas, pour sauver le reste ?