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Page:Alain - Les Dieux, 1934.djvu/138

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l’enfance est la peur sans objet ; d’où l’idéal de l’enfance est le courage sans objet, j’entends sans moyens ni obstacles autres que soi. Vaincre la peur, alors, c’est vaincre tout. La magie est ainsi dans l’enfance une puissance qui ouvre tout, et non pas seulement la magie suppliante, mais la magie qui commande par le signe ; c’est faire le signe comme il doit être, abstrait et pur. Tel est le dessein premier qui est le dessin premier. En esquisse est d’abord notre vie, en ce trait menu qui commence par finir. Le cercle est enfant ; sa loi est tout humaine. Et que d’hommes trahissent le cercle ! Le droit est l’image de la vertu ; le courbe fléchissant est celle du vice, ainsi que disaient les Pythagoriciens, ces sublimes enfants. Le fait est que ces signes sans substance donnent la clef des choses ; mais ils donnent premièrement la clef de soi. Comme il faut oser l’héroïque géométrie avant l’expérience, il faut oser la vie héroïque avant l’expérience,