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Page:Alain - Les Dieux, 1934.djvu/303

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que les hommes soient des animaux. Tout étant faux, le vrai peut se produire. Il y a plus d’une raison des fictions, comme on l’a assez expliqué. Mais cette essentielle fiction s’explique assez par ceci que, d’après l’ordre de puissance, qui ne renonce jamais, aucune vérité ne peut être dite. Le comique a sans doute pour loi de se faire incroyable ; et la plus ancienne des comédies devait être absolument incroyable. Non que le roi même, s’il écoute la fable, ne garde le pouvoir de revenir à soi ; mais il le garde entier ; le fabuliste, très ingénieusement, maintient son théâtre de bêtes, et se garde d’instruire. La morale même rassure, car elle s’applique à l’homme, mais toutes choses changées. Ce n’est plus que comparaison, au lieu que le vrai de la fable est tout dans la terrible image ; il n’y faut rien atténuer, ni rien transporter. La seule fiction des animaux parlants exprime le jeu de la force tel qu’il serait sans aucune hypocrisie, et