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Page:Alain - Mars ou la Guerre jugée, 1921.djvu/162

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Vanité, alors, de tous les échanges. Et comme la mauvaise monnaie chasse la bonne, ainsi le plus vil occupe la place, dans le cercle des apparences d’abord, et aussi en chacun.

Transportez à la grande société cette folie mécanique. C’est peut-être par là qu’on peut le mieux comprendre la guerre folle et adorée. Comme l’humain, dans la vie domestique, tombe à la crise de nerfs, qui est convulsion pure, ainsi toute vie mécanisée va à la guerre mécanique dont l’excès devrait étonner. Mais étonner qui ? Il n’y a plus d’hommes. Les discours mécaniques règnent sur la violence mécanique. Et il est bien plaisant de surprendre des essais de pensée encore, qui tentent de s’élever ; mais l’inférieur tire ferme et ramène à lui. Je le vois à deux signes ; d’abord à ceci que l’expression revient dans les mêmes chemins après des essais incohérents ; la première difficulté et contradiction est comme un rappel à la condition désormais inférieure irrévocablement ; et aussi d’après le ton irrité, comme si toute pensée, même en essai et esquisse, était par elle-même douloureuse. Avertissement assez clair ; il faut jouer aux cartes. Contemplez la vie privée de ceux qui veulent être l’élite ; c’est le jeu de cartes et la violence mécanique des passions. Aussi dans la vie publique, un jeu de cartes sans aucune réalité ; et si l’on revient au réel, la guerre aussitôt.

Un homme qui porte encore la couronne, mais malgré lui elle tombe, il passe son temps à la remettre de travers sur sa tête, cet homme, donc, disait que la cause des guerres c’est l’ennui. Mais la cause de l’ennui ? Cela ne peut être que le silence et l’abdication de ce qui est humain devant ce qui est animal et sera finalement mécanique. Abdication dans le cercle et en chacun. Et considérez qu’en une mécanique à visage humain il y a invincible apparence de fermeté et de courage.