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Page:Alain - Système des Beaux-Arts.djvu/42

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CHAPITRE VIII

DU CÉRÉMONIAL

L’inflexible ordre extérieur est toujours assez connu par l’expérience des moindres métiers, pour que l’esprit observateur s’y puisse reposer des rêveries informes, et se reprendre et composer en percevant. Toutefois cet ordre n’est jamais le premier connu. L’ordre humain est nécessairement le premier univers, dont l’enfant attend tout, et sur quoi il se règle. Et l’on sait que, principalement dans les climats où la vie est aisément assurée, et où l’industrie se trouve réduite à quelques faciles travaux, l’ordre humain domine toujours comme objet. De toute façon, puisque l’ordre humain est le premier connu, toutes nos idées se forment de là, comme l’ambiguïté des mots loi et ordre, pour ne citer que ceux-là, le montre assez. Aussi toute pensée conçoit d’abord l’ordre extérieur d’après l’ordre humain, ordre bien plus flexible que l’autre, et où le désir et la prière peuvent beaucoup. Mais il suffit de dire, en bref, que l’ordre humain est naturellement sujet aux désordres d’imagination, encore grossis par la contagion des affections, en sorte que l’emportement, l’irritation, la convulsion s’y développent aisément, comme l’expérience le fait voir en tous temps par les paniques, fureurs et délires des foules.

On sait que même les peuples les plus ignorants, et