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Page:Alain - Système des Beaux-Arts.djvu/97

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CHAPITRE III

DU RYTHME POÉTIQUE

Tout mouvement répété se fait selon un rythme, le repos alternant avec l’effort, et régulièrement, dans un travail que l’on sait faire et qui doit durer longtemps. Surtout l’action en commun veut un rythme parlé ou chanté, qui enferme toujours un temps de repos après l’effort, et un temps d’avertissement, ou demi-fort, qui précède le temps fort. On peut le constater dès qu’il s’agit de tirer sur un câble ; et le forgeron suit une règle du même genre, et divise le temps selon la même loi, afin que l’aide qui présente le fer ne soit point surpris. Ainsi est née l’âme de la musique ; mais nous ne traitons pour le moment que de la poésie. Et certes il y a bien un rythme dans les vers, mais je le vois assez différent du rythme musical ; il faut dire en quoi, en nous bornant aux vers français ; car parler seulement de ce que l’on connaît bien, c’est le moyen d’expliquer encore beaucoup d’autres choses.

Dans le rythme musical la division du temps est le principal, et jusque dans l’harmonie comme nous verrons ; c’est pourquoi même les silences y sont exactement mesurés. Dans la poésie, il n’en est pas de même ; les silences y sont pris au gré du récitant, en sorte que ce qui est l’exception dans la musique, j’entends la déclamation et les ornements avec