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Page:Alcott - Les Quatre Filles du docteur Marsch.djvu/16

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LES QUATRE FILLES DU DOCTEUR MARSCH.

La figure des trois sœurs s’éclaircit à ces paroles. Elle s’assombrit de nouveau quand Jo ajouta tristement :

« Mais papa n’est pas près de nous et n’y sera pas de longtemps. »

Elle n’avait pas dit : « Nous ne le reverrons peut-être jamais ; » mais toutes l’avaient pensé et s’étaient représenté leur père bien loin, au milieu des terribles combats qui mettaient alors aux prises le Nord et le Sud de l’Amérique.

Après quelques moments de silence, Meg reprit d’une voix altérée :

« Vous savez bien que maman a pensé que nous ferions mieux de donner l’argent de nos étrennes aux pauvres soldats qui vont tant souffrir du froid. Nous ne pouvons pas faire beaucoup, c’est vrai, mais nos petits sacrifices doivent être faits de bon cœur. Je crains pourtant de ne pas pouvoir m’y résigner, ajouta-t-elle en songeant avec regret à toutes les jolies choses qu’elle désirait.

— Mais nous n’avons chacune qu’un dollar, dit Jo ; quel bien cela ferait-il à l’armée d’avoir nos quatre dollars ? Je veux bien ne rien recevoir ni de maman ni de vous, mais je voudrais acheter les dernières œuvres de Jules Verne, qu’on vient de traduire ; il y a longtemps que je le désire. Le capitaine Grant est, lui aussi, séparé de ses enfants, — mais ses enfants le cherchent, — tandis que nous… nous restons là. »

Jo aimait passionnément les aventures.

« Je désirais tant de la musique nouvelle ! murmura Beth avec un soupir si discret que la pelle et les pincettes seules l’entendirent.

— Moi, j’achèterai une jolie boîte de couleurs, dit Amy d’un ton décidé.