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Page:Alexis - La Fin de Lucie Pellegrin, etc, 1880.djvu/103

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L’INFORTUNE DE MONSIEUR FRAQUE

à la religion, comme à une chose peu délicate, repoussante, presque cynique, bonne pour la populace. Elle eût préféré tout de suite s’adonner au besigue comme la vieille madame de Gombaud, ou à l’éducation des épagneuls. Mais, avec ce gentilhomme plein de tact, pénétrant et sachant effleurer, une première confession lui sembla une heure de conversation ordinaire, d’une intimité charmante. Agenouillée au fond de ce confessionnal à l’ouverture duquel retombait un rideau vert, elle se crut un peu dans son boudoir. Quelle haute et surprenante perspicacité de médecin d’âmes chez cet enfant blême et poétique, qu’elle voyait, à travers le grillage, rejeter à chaque instant de longs cheveux bouclés pour regarder le ciel. Celui-là ne pouvait manquer d’aller loin et haut ! En recevant de lui l’absolution, cette vieille femme qui n’avait jamais été bien romanesque, voyait déjà son nouveau directeur, évêque, archevêque, cardinal, — se promettait de souvent revenir.

Et elle revint, prenant goût de plus en plus à la religion et au confesseur. Elle ne sentait plus comme autrefois son existence vide. Quelque chose d’absorbant, de profond, avait pris la place de cette agitation profane et toute à la surface qui jadis emportait sa vie, et lui faisait glisser si rapidement les semaines, les mois, les années. Son mari lui-même, sans cesser, au fond, de le haïr, elle ne se livrait plus comme autrefois au passe-temps de lui rendre cha-