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Page:Alexis - La Fin de Lucie Pellegrin, etc, 1880.djvu/109

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L’INFORTUNE DE MONSIEUR FRAQUE

tant il éprouvait le besoin d’être secoué, de se distraire. Alors il se trouva tout étonné de n’avoir pas songé plus tôt à quelque grand voyage : — Nice, Gênes, Florence, Rome, Naples, Venise ; — après l’Italie, la Suisse et les bords du Rhin ; — enfin Paris, qui depuis 1829 devait être bien changé, mais « Paris qui est toujours Paris », où il retrouverait de vieux amis et des souvenirs de jeunesse. Revenu le jour même à l’hôtel de Beaumont, il faisait faire ses malles par Isnard. Zoé ne fut pas plus disposée à le suivre en voyage qu’à la campagne. Le soir, Hector prit congé de sa femme qui, distraite, reçut de mauvaise grâce, sur un front dur et jaune, la caresse d’adieu du voyageur. Vers dix heures, le cœur gros, il monta dans le coupé de la diligence de Toulon. Le surlendemain soir, M. Fraque était de retour. Dans le coupé, quoique seul, il n’avait pu dormir. À Toulon, il n’avait même pas regardé la rade : il n’avait visité que le bagne, où la vue des forçats en bonnet vert, condamnés à traîner leur boulet à perpétuité, avait navré l’ex-procureur du roi. Il n’avait pas eu le courage d’aller plus loin, et son grand voyage s’était tout de suite terminé.

Donc, rien à faire : pas de désœuvrement à prétexter, pas de distractions à espérer trouver. M. Fraque se sentait redevenu profondément malheureux.

Et ce n’était ni la vieillesse, ni l’ambition inactive, ce qui l’inquiétait : mais, sa femme, toujours sa femme ! Il n’en savait pas plus. Il avait beau écar-