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Page:Alexis - La Fin de Lucie Pellegrin, etc, 1880.djvu/18

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LA FIN DE LUCIE PELLEGRIN

la frisée, qui portait son mazagran aux lèvres, s’interrompit afin de partager en deux avec les dents, pour la chienne, son second morceau de sucre. L’autre Adèle, profondément absorbée, resta le nez baissé sur ses cartes. Quant à Héloïse, elle avait déjà posé sa cigarette allumée sur le bord d’une assiette, et attiré la chienne à elle.

— Ma belle, tu vas avoir des petits, disait-elle affectueusement.

Et elle caressait Miss à deux mains. Le bête se laissait faire, allongeant le cou et baissant ses oreilles pelées, se laissant aussi toucher les flancs, où le poil roux, par larges plaques, manquait. Héloïse faisait mine de l’embrasser sur le museau, lui prenant la tête qu’elle gardait sur les genoux sans crainte de salir sa robe neuve de toile bleue à pois blancs.

Victor parut, remplissant la porte de son torse énorme en veston blanc de cuisinier, un balai à la main pour chasser la chienne. Mais la grande Adèle, sans lâcher sa feuille d’artichaut trempée de sauce, lui saisit vivement le bras.

— Voulez-vous la laisser !

— Elle ne vous a rien fait peut-être !

— C’est la chienne à la Pellegrin, vous le savez aussi bien qu’un autre.

Devant ces exclamations simultanées, Victor se retira en haussant les épaules. Son départ fut salué de longs et bruyants éclats de rire qui triomphaient. L’autre Adèle, qui venait enfin de trouver accouplés