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Page:Alexis - La Fin de Lucie Pellegrin, etc, 1880.djvu/218

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LES FEMMES DU PÈRE LEFÈVRE.

petite Laure, un vrai crin, l’œil allumé et la trogne rubiconde, menaçait à chaque instant la longue Dolorès d’un crêpage de chignon en règle. Certaines, tournant le dos à la table, commençaient à dévisager effrontément les Coqs avec l’air de dire : « Me voilà ! qui en veut ? » Elles parlaient, maintenant, très fort. Après l’ahurissement de l’arrivée, intimidées au premier moment par l’étrange accueil de la population, voilà qu’elles étaient chez elles.

— Ouf ! fit Georgette en se levant, moi, j’ai des fourmis dans les jambes.

Et elle circulait déjà dans le Divan, entre deux Coqs qui la tenaient à la taille. Les autres se levèrent aussi. Bientôt il ne resta, pour tenir compagnie à M. Lefèvre, que l’énorme Boulotte, attablée à l’autre extrémité. Boulotte, la bouche pleine, achevait un reste de biscuit. Tout à coup elle poussa de petits cris d’effroi en se sentant enlevée de sa chaise. C’était un tour de force de Mauve, de Toulon, et du Polaque, qui, l’ayant prise en poids, allèrent décharger ce fardeau sur le grand divan du fond de la salle. Pendant ce temps M. Lefèvre, seul encore à table, se versait tranquillement de l’absinthe en homme qui se délasse après une journée bien employée. Et Boulotte furieuse, éboulée sur le divan, gigotait, les mollets à l’air, tripotée et pétrie par toutes sortes de mains. À côté d’elle, Bianca tenait tête à la bande des Corses. Tandis que les Égyptiens, un peu plus loin, graves et silencieux, faisaient cercle autour de