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Page:Alexis - La Fin de Lucie Pellegrin, etc, 1880.djvu/357

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JOURNAL DE MONSIEUR MURE.

perpétuelle adoration. Ébloui, détournant les yeux, je refermai.

Un coup d’œil au jardin par la porte vitrée du vestibule… Depuis le soir d’été où Moreau, sur la terrasse, s’endormit dans son fauteuil, le journal glissé à ses pieds, je n’avais plus marché dans ces allées. Presque rien de changé ! Pas de traces de la possession des Jauffret, heureusement ! Je reconnaissais la forme des massifs à feuillage persistant du bosquet. Seuls, les quatre jeunes platanes de la terrasse, méconnaissables en douze ans, devenus de grands arbres au tronc énorme, et aux longues branches n’en finissant plus, toutes maintenant dépouillées de feuilles. En douze ans, que de choses ! Ce soir, une fête, et en même temps, l’hiver ! Des grappes de lanternes vénitiennes déjà allumées, suspendues entre chaque platane ; des cordons de lampions à verres de couleurs, dessinant les marches du perron, les banquettes et les piliers de la terrasse. Mais une bise âpre, glacée, soufflant par moments, couchait les petites flammes toutes à la fois, en éteignait çà et là, et secouait lamentablement les grandes grappes lumineuses. Tout à coup, le papier d’une lanterne vénitienne prenait feu, flambait une seconde, coulait en grosses larmes enflammées ; puis, au milieu de la grappe aux couleurs joyeuses, tout de suite, un trou noir.

J’étais au premier étage… L’antichambre, vaste, qui est en même temps la salle de billard, je ne la