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Page:Alexis de Tocqueville - De la démocratie en Amérique, Pagnerre, 1848, tome 2.djvu/335

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DE LA DÉMOCRATIE EN AMÉRIQUE.

On rencontre enfin des objets qui ont une nature mixte : ils sont nationaux, en ce qu’ils intéressent tous les individus qui composent la nation ; ils sont provinciaux, en ce qu’il n’y a pas nécessité que la nation elle-même y pourvoie. Ce sont, par exemple, les droits qui règlent l’état civil et politique des citoyens. Il n’existe pas d’état social sans droits civils et politiques. Ces droits intéressent donc également tous les citoyens ; mais il n’est pas toujours nécessaire à l’existence et à la prospérité de la nation que ces droits soient uniformes, et par conséquent qu’ils soient réglés par le pouvoir central.

Parmi les objets dont s’occupe la souveraineté, il y a donc deux catégories nécessaires ; on les retrouve dans toutes les sociétés bien constituées, quelle que soit du reste la base sur laquelle le pacte social ait été établi.

Entre ces deux points extrêmes, sont placés, comme une masse flottante, les objets généraux, mais non nationaux, que j’ai appelés mixtes. Ces objets n’étant ni exclusivement nationaux, ni entièrement provinciaux, le soin d’y pourvoir peut être attribué au gouvernement national ou au gouvernement provincial, suivant les conventions de ceux qui s’associent, sans que le but de l’association cesse d’être atteint.

Le plus souvent, de simples individus s’unissent pour former le souverain, et leur réunion compose un peuple. Au-dessous du gouvernement général qu’ils se sont donné, on ne rencontre alors que des forces individuelles ou des pouvoirs collectifs dont chacun représente une fraction très minime du sou-