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Page:Alexis de Tocqueville - De la démocratie en Amérique, Pagnerre, 1848, tome 2.djvu/337

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DE LA DÉMOCRATIE EN AMÉRIQUE.

douter que le gouvernement national ne finisse par être dépouillé des privilèges nécessaires à son existence.

Les peuples uniques sont donc naturellement portés vers la centralisation, et les confédérations vers le démembrement.

Il ne reste plus qu’à appliquer ces idées générales à l’Union américaine.

Aux États particuliers revenait forcément le droit de régler les objets purement provinciaux.

De plus, ces mêmes États retinrent celui de fixer la capacité civile et politique des citoyens, de régler les rapports des hommes entre eux, et de leur rendre la justice ; droits qui sont généraux de leur nature, mais qui n’appartiennent pas nécessairement au gouvernement national.

Nous avons vu qu’au gouvernement de l’Union fut délégué le pouvoir d’ordonner au nom de toute la nation, dans les cas où la nation aurait à agir comme un seul et même individu. Il la représenta vis-à-vis des étrangers ; il dirigea contre l’ennemi commun les forces communes. En un mot, il s’occupa des objets que j’ai appelés exclusivement nationaux.

Dans ce partage des droits de la souveraineté, la part de l’Union semble encore au premier abord plus grande que celle des États ; un examen un peu approfondi démontre que, par le fait, elle est moindre.

Le gouvernement de l’Union exécute des entreprises plus vastes, mais on le sent rarement agir. Le gouvernement provincial fait de plus petites choses, mais il ne se repose jamais et révèle son existence à chaque instant.