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Page:Alexis de Tocqueville - De la démocratie en Amérique, Pagnerre, 1848, tome 2.djvu/400

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ÉTAT ACTUEL ET AVENIR DES TROIS RACES.

riches que leurs ennemis ; ils possédaient infiniment moins de ressources ; cependant ils furent constamment victorieux, jusqu’à ce que ces derniers eussent pris le parti de les imiter.

Les Américains ont introduit quelque chose d’analogue dans le commerce. Ce que les Français faisaient pour la victoire, ils le font pour le bon marché.

Le navigateur européen ne s’aventure qu’avec prudence sur les mers ; il ne part que quand le temps l’y convie ; s’il lui survient un accident imprévu, il rentre au port ; la nuit, il serre une partie de ses voiles, et lorsqu’il voit l’Océan blanchir à l’approche des terres, il ralentit sa course et interroge le soleil.

L’Américain néglige ces précautions et brave ces dangers. Il part tandis que la tempête gronde encore ; la nuit comme le jour il abandonne au vent toutes ses voiles ; il répare en marchant son navire fatigué par l’orage, et lorsqu’il approche enfin du terme de sa course, il continue à voler vers le rivage, comme si déjà il apercevait le port.

L’Américain fait souvent naufrage ; mais il n’y a pas de navigateur qui traverse les mers aussi rapidement que lui. Faisant les mêmes choses qu’un autre en moins de temps, il peut les faire à moins de frais.

Avant de parvenir au terme d’un voyage de long cours, le navigateur d’Europe croit devoir aborder plusieurs fois sur son chemin. Il perd un temps précieux à chercher le port de relâche ou à attendre l’occasion d’en sortir, et il paye chaque jour le droit d’y rester.

Le navigateur américain part de Boston pour aller