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Page:Alexis de Tocqueville - L'Ancien Régime et la Révolution, Lévy, 1866.djvu/348

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oblige à faire un effort. Tout ce qui leur reste de virilité est employé là, et elles se montrent presque toujours fortes en cet endroit, fussent-elles débiles dans tous les autres. Le bonheur voulut que l’ancienne constitution du Languedoc fût rétablie durant l’enfance de Louis XIV. Celui-ci, la regardant comme son ouvrage, la respecta. Louis XV en suspendit l’application pendant deux ans, mais ensuite il la laissa renaître.

La création des offices municipaux lui fit courir des périls moins directs, mais non moins grands ; cette détestable institution n’avait pas seulement pour effet de détruire la constitution des villes, elle tendait encore à dénaturer celle des provinces. Je ne sais si les députés du tiers-état dans les assemblées provinciales avaient jamais été élus pour l’occasion, mais depuis longtemps ils ne l’étaient plus ; les officiers municipaux des villes y étaient de droit les seuls représentants de la bourgeoisie et du peuple.

Cette absence d’un mandat spécial et donné en vue des intérêts du moment se fit peu remarquer tant que les villes élurent elles-mêmes librement, par vote universel et le plus souvent pour un temps très-court, leurs magistrats. Le maire, le consul ou le syndic représentait aussi fidèlement alors dans le sein des États les volontés de la population au nom de laquelle il parlait que s’il avait été choisi tout exprès par elle. On comprend qu’il n’en était pas de même de celui qui avait acquis par son argent le droit d’administrer ses concitoyens. Celui-ci ne représentait rien que lui-même, ou tout au plus les petits intérêts ou les petites passions de sa coterie. Ce-