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Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 10.2.djvu/589

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MORALITE DE L’ACTE HUMAIN

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réponse, l’une négative, celle des thomistes et de la presque unanimité des théologiens modernes (S. Thomas, Ia-IIæ, q. xvrn, a. 9 ; In IIum Sent., dist. XL, q. i, a. 5 ; S. Alphonse, Theol. mor., t. V, n. 44 ; Muller, Theol. mor., 7’éd., Vienne. 1894, I, § 97 ; Billuart, De act. hum., diss. IV, a. 6 ; Simar, Moraltheologie, 3° éd., Fribourg, 1893, § 56 ; Bouquillon, op. cit., n. 377 ; N’oldin, op. cit., n. 84 ; Lehmkuhl, op. cit., tr. i, n. 37 ; Prûmmer, op. cit., n. 129 ; Tanquerey, op. cit., n. 191 ; Cathrein, De bon. et mal. acl. hum., Louvain, 1926, p. 51 sq.) ; l’autre affirmative, celle des scotistes et de quelques rares moralistes actuels (Scot, In II am, dist. XLI ; S. Bonaventure, In IIum, dist. XLI, a.l.q.m ; Vasquez, In I &m -U ! B, disp. LU, c. 4 ; Beuter, Theol. mor., pars 1, 1. 1, n. 55 ; Viva, Curs. theol., t. ii, disp. VII, q. 3 ; Walsh, De acl. hum., Dublin, 1891, n. 588).

Il n’est pas possible, selon saint Thomas, de concevoir un acte délibéré considéré in individuo, qui soit indifférent. En effet, tout acte individuel possède quelque circonstance, ne serait-ce que celle de fin, qui le rend bon ou mauvais. Comme le rôle de la raison est d’ordonner, il s’en suit que tout acte, issu d’une délibération de la raison, ou bien n’est pas dirigé par elle vers une fin convenable, et par là même il répugne à la raison et est mauvais ; ou bien il est dirigé vers une fin convenable, il est en conformité avec la raison, il est bon. Or il n’y a pas de milieu possible : la fin poursuivie conviendra ou ne conviendra pas à la nature raisonnable. Il faut donc que tout acte délibéré considéré in individuo soit bon ou mauvais. I a - II ffi, q.xviii, a. 9 ; In II am, dist. XL, q. i, a. 5. Billuart apporte un argument semblable, tiré de la fin que l’on trouve nécessairement dans tout acte délibéré. Finis actus humani in quo agens quiescit, vel est Deus, sive actualiter, sive virtualiler, sive explicite, sive implicite (perinde est ad proposilum) inlentus ; vel est creatura : sub his enim duobus finibus omne » fines conlincntur : si primum, est bonus ; si secundum, est malus, quia hoc est uti fruendis et frui utendis, ut alicubi dicit S. Augustinus. De acl. hum., diss. IV, a. 6. C’est donc la fin que se propose tout être raisonnable dans un acte délibéré qui donnera à l’acte, indifférent in abslracto, une moralité spéciale.

Bemarquons cependant que, pour la bonté morale, il n’est pas nécessaire que l’on se propose explicitement une fin conforme à la raison ; il suffit, et ce sera bien souvent le cas, qu’elle soit voulue implicitement, résultant des circonstances particulières dans lesquelles on agit. Ainsi celui qui joue, qui se promène, ne se proposera pas toujours explicitement une fin raisonnable, comme serait de reprendre des forces, de reposer l’esprit pour mieux travailler. Son acte cependant sera bon s’il le fait avec modération, circonstance qui rendra son acte pleinement conforme à la nature raisonnable ; il sera mauvais, s’il le fait sans cette modération, au détriment d’occupations plus sérieuses et nécessaires, ce qui est contraire à la raison.

Les scotistes voient dans le premier de ces exemples une action indifférente. La principale raison qu’ils donnent c’est que, selon eux, pour qu’une action soit moralement bonne, elle doit être accomplie expressément en vue d’une fin conforme à la nature raisonnable, ce qui n’est pas le cas dans l’exemple proposé. D’autre part, une telle action, accomplie avec modération, ne saurait être mauvaise, car elle n’est pas opposée à la nature raisonnable. Elle est donc indifférente. Toute la discussion repose donc sur la question étudiée et résolue plus haut de l’intention requise pour qu’un acte soit moralement bon. Sur les Objections faites par les scotistes à la thèse thomiste, cf. Billuart, op. et., diss. IV, a. 6.

Conclusion. — Bonum ex intégra causa, malum ex quoeumque de/ectu. Cet axiome, déjà énoncé par l’auteur du Lib. de divinis nominibus, P. G., t. iii, col. 130, résume toute la théorie de la moralité de l’acte humain. Il ne doit cependant pas être pris dans un sens trop absolu. Pour que nos actes soient moralement bons, il faut que tous les éléments qui concourent à leur production, objet, circonstances et fin, soient conformes à la règle de la moralité. L’objet doit être bon ; s’il est mauvais, l’acte ne peut qu’être mauvais ; s’il est indifférent, la fin ou les circonstances pourront le rendre bon. Les circonstances doivent être bonnes, ou au moins indifférentes : gravement mauvaise, une circonstance rend, plus probablement, l’acte intégralement mauvais ; légèrement mauvaise, elle diminue seulement sa bonté morale. La fin doit être bonne et sa bonté morale doit être recherchée, au moins implicitement : toute fin mauvaise, qui serait la cause totale de l’acte, lui enlève sa bonté objective ; de même, au moins suivant l’opinion commune, toute fin gravement mauvaise, qui ne serait que cause partielle de l’acte ; cause partielle et légèrement mauvaise, elle ne fait que diminuer la bonté morale de l’acte humain. C’est dans ce sens et avec ces restrictions que l’on peut dire qu’un défaut quelconque, dans les éléments constitutifs de la moralité, rend l’acte mauvais.

L. Marchal.

    1. MORAWSKI Jean##


MORAWSKI Jean, théologien, controversiste et auteur spirituel de la Compagnie de Jésus (1633-1700). — Né le 20 décembre 1633 dans la Petite-Pologne, entré dans la Compagnie le 4 novembre 1651, il y enseigna la philosophie et les mathématiques, puis 14 ans la théologie scolastique. 3 ans la controverse et 1 an la théologie morale ; fut 6 ans maître des novices. — Ses œuvres comprennent, en conséquence, des livres : 1. de philosophie ; 2. de théologie ; 3. de controverse ; 4. de spiritualité.

1. Philosophie : Totius philosophiæ principia per quæstiones de Ente in communi, ex prælectionibus P. J. Morawski, S. J., explicata. Opus cum philosophis, tum iheologis utilissimum, Lyon, 1688, pet. in-8°, 352 p. La première édition avait paru en 1660. — 2. Théologie : Quæstiones de Deo Uno et Trino ; Quæstiones de Verbo incarnato et de ejusdem admirabili Matre virgine ; Quæstiones thologicæ selectæ ad II âm -II m et ad III &m partem D. Thomæ Aquinatis ; Quæstiones theologicæ selectæ ad totam Summam D. Thomæ Aquinatis.

— 3. Controverse : S. R. Ecclesia ab antiquis calumniis hæreticorum de novo suscitatis vindicata. —4. Spiritualité : ce sont surtout des livres de piété ou de méditations pour les élèves des collèges ou les novices de la Compagnie de Jésus ; ils paraissent avoir eu beaucoup de succès.

Morérl, Le grand dictionnaire historique, édit. de 1759, t. vii, p. 766 ; Sommervogel, Bibliothèque de la Compagnie de Jésus, t. v, col. 1286-1290.

A. Fonck.

MORE (Le bienheureux Thomas) (1478-1535). I. Biographie. IL La pensée religieuse de More et V Utopie (col. 2176). III. More controversiste catholique (col. 2179).

I. Biographie.

Thomas More naquit à Londres le 7 février 1478 (cf. Bridgett, p. 1-3) d’une famille de bonne bourgeoisie. Soti père, Sir John More, était parvenu à la haute situation de juge du Banc du Roi. Il fut attaché de bonne heure à la maison du cardinal Morton, archevêque de Cantorbéry, homme remarquable par sa vertu et sa foi, dont il subit profondément l’influence. Il passa ensuite à Oxford deux années d’une vie studieuse et frugale (1492-94) où il se perfectionna dans l’étude des lettres anciennes. Il s’y lia avec deux humanistes célèbres, Thomas