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Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 10.2.djvu/619

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    1. MOZARABE (MESSE)##


MOZARABE (MESSE), LE SACRIFICE

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Sursum corda. Le choeur : l.evemus ad Dominum. Le prêtre incliné el les mains jointes : Deo ac Domino nos-Iro Jesu Christo filio Dei qui est in relis diynas laudes dignasque gratias referamus ; ici le prêtre élève les mains vers le ciel. Le chœur : Dignum et justumest, P. L.. loc. cit., col. 115. l.’iltatio mozarabe, comme la préface romaine ou la contestatio gallicane, aboutit toujours au sanctus et le sanctus en Espagne comme en Gaule, à la différence de Rome, est suivi d’une oraison dont le titre est toujours Posl sanctus. Pour saint Isidore Yillatio ou cinquième oraison, comprend le Sanctus et le Posl sanctus, et aussi la consécration. La sixième oraison est celle du Posl pridie ou confirmatio sacramenti. Cette division paraît assez juste, car elle marque bien l’étroite union de toutes ces parties de Yillatio à la fin de la consécration. Elle rend mieux compte aussi du titre immolatio qui est celui de la préface dans les liturgies gallicanes et qui est un bon synonyme de consecratio.

Quant au mot de illalio. il est caractéristique des livres mozarabes. On a voulu y voir une erreur de copiste pour immolatio, qui est le titre gallican de la préface, nous l’avons dit, et qui s’explique tout naturellement. Mais il est curieux, si c’est une erreur de copiste, qu’elle soit aussi universelle, car on rencontre le mot dans tous les livres mozarabes ; le préface y est partout appelée illalio, et jamais encore, je crois, on n’y a trouvé celui d’immolatio, si ce n’est une fois dans le Liber ordinum. Cette différence ne laisse pas d’être curieuse et mériterait peut-être une étude. Illalio ou inlalio comme oblatio dont il est synonyme, est à peu près la traduction du mot anaphore, àvà cpépto, offrir. Dans la langue post-classique le mot inlalio (de inferre) désigne l’action de porter, comme invectio ; il s’applique notamment aux morts (Ulpien) ; il signifie aussi le paiement d’un tribut. En langage philosophique l’illalio est une conclusion tirée des prémisses, ex duobus sumplis ratione sibimet nexis conficitur illalio (Capella). En Espagne, le mot est employé par les conciles dans le sens de don, de présent, de tribut : IIIe concile de Braga, can. 2. ; et VIIe concile de Tolède. Voir art. Illalio du Diction, d’archeol. C’est donc bien au contraire le terme de immolatio des liturgies gallicanes qui serait une corruption ou, si l’on veut, une interprétation paléographique du mot illalio. C’est l’opinion de do m Cagin, Les noms latins de la préface eucharistique, dans Rassegna Gregoriana, 1906, p. 322-358 ; c’est celle vers laquelle inclinait déjà Lcsley ( cf. P. L., t. i.xxxv, col. 507). Mais ce n’est jusqu’ici qu’une hypothèse appuyée sur la similitude des deux noms. Lesterait à expliquer pourquoi l’un est exclusivement employé dans les manuscrits mozarabes, l’autre à peu près exclusivement dans les gallicans. Sur ce point ces derniers sont moins exclusifs que les mozarabes. Dans le Missale gothicum et dans le Missale gall’.canum, immolatio alterne avec contestatio et preefatio missæ ; il ne se trouve pas dans le Missale Francoruin ; il est une seule fois dans le missel de Bobbio et, semble-t-il, par hasard (cf. Paléographie musicale, t. v, p. 100, 101, et 168). Le terme est absent, aussi bien du reste que contestatio, dans les lettres du Pseudo-Germain, et peut-être est-ce un nouvel argument en faveur de la date récente de ces prétendues lettres. Cf. Germain (I. cllrcs de saint) dans Diction, d’archeol. Ces glossaires, le Thisaurus de Ducange, Forcellini, Freund, le Thésaurus lingues latines de Leipzig (au mut contestatio), ne donnent sur tout cela que des renseignements insu (lisants.

Nous ne dirons rien du dialogue qui précède’lllalio. Il contient les éléments que l’on peut dire essentiels et que l’on rencontre dans toutes les liturgies,

Sursum corda, Gratias agamus, etc., et qui servaient de

début à toutes les préfaces : Yere dignum et justum esl, etc. A la sobriété du dialogue de la préface romaine, la liturgie espagnole ajoute, comme toujours, des ornements et des complications qui ne font guère qu’alourdir le texte.

Il faut dire la même chose de Villatio elle-même. Les livres mozarabes nous offrent la collection la plus riche et la plus variée d’illaliones ; il n’est guère de messe qui n’ait son illalio ; quelques-unes comprennent plusieurs colonnes de texte, et si elles ont été chantées, elles ont pu durer jusqu’à une demi-heure. Nous essaierons tout à l’heure d’en découvrir les auteurs. Disons dès maintenant qu’elles forment un recueil dogmatique d’un prix incalculable pour l’étude de l’histoire théologique de l’Espagne au Moyen Age, recueil qui, il faut le dire, a été encore assez peu étudié. Il y a là des pages qui font honneur à la science, à la profondeur, et à la culture des théologiens espagnols du v c au ixe siècle. Nous avons traité ailleurs la question de l’orthodoxie de cette liturgie (voir Liturgie, col. 8Il sq.) et nous y reviendrons tout à l’heure. Il y a sans doute de-ci, de-là quelques opinions singulières, mais dans l’ensemble quelle richesse de doctrine, quelle ferveur de foi et de piété ! On y trouve de vraies thèses de théologie, et de longs panégyriques pour la fête des saints, notamment des saints d’Espagne, comme saint Vincent ou sainte Eulalie. Nous ne citerons que Villatio sur la Samaritaine, celles sur l’aveugle-né, sur le jeûne, sur la Trinité, sur la descente aux enfers, sur les patriarches, etc. Les premières sont dans le Liber sacramentorum, édité par dom Férotin, aux p. 167, 178, 184, 224, 290 ; Villatio sur les patriarches dans P. L., t. lxxxv, col. 271 et 286. Voir aussi, col. 281, Villatio sur la Trinité.

Naturellement on y retrouve les défauts que nous avons déjà signalés dans toutes les pièces de cette liturgie, et qui sont celles de la littérature latine d’Espagne, surtout du vie au xe siècle, la prolixité, le verbiage, l’abus des conectti et des jeux de mots, déjà tous ces défauts que l’on décorera du nom de gongorisme.

Le Sanctus. — h’illatio aboutit toujours par une transition au Sanclus. Le Sanctus de la messe mozarabe n’est pas invariable comme dans la liturgie romaine et la plupart des autres liturgies. Dans leur amour de la variété, les auteurs de cette liturgie y introduisaient parfois des changements. Voici la forme ordinaire :

Sanctus, sanctus, sanctus Dominus Devis Sabaoth : pleni sunt celi et terra gloria majestatis tue : osanna filio David : Osanna in excelsis. Benedictus qui venit in nomine Domini : Osanna in excelsis ; P. L., loc. cit., col. 116,

I.e jour de Pâque nous avons cette forme :

Agyos, Agyos, Agyos. Kyrie. Otheos. Sanctus, Sanclus, Sanctus : Dominus Deus sabaoth. Pleni, etc., Osanna in excelsis. Agyos, Agyos, Agyos. Te Domine laudat omnis viilus celoruni : et exercitus angeloruni. Tibi hynimmi depromuiït nielliflua carmins sanctorum. Tibi psallunl choree virginum : et ectus confessonini. Tibi gemia curvant celestia. Terrestria. Kl interna. Laudant te Regem omnium seculorum. Osanna in excelsis, Ibid., col. 484, 18.">.

Léchant du Sanclus est assigné au chœur dans les livres mozarabes. Autrefois en Espagne comme en daule, le Sanctus élail chanté par le peuple. Aussi avons-nous dans un Posl Sanclus ces paroles : Psallitur [hymnus Iste] ab angelis, el hic solemniter decanlatur a.populis, Post sanctus du v dimanche de carême, P. /… col. ; 170. Grégoire de Tours dit de son coté : Ubi expedita contestations omnis populus sanctus in Domini laudem proclamavit. Demir. S. Martini, t. II, C XIV. Même coutume autrefois dans les liturgies orientales, comme on le voit par les Constitutions apostoliques, et par les textes de saint Jean Chrysostomeet de saint Grégoire de Nysse, cités par Lcsley,