Aller au contenu

Page:Alfred de Vigny - Cinq-Mars, Lévy, 1863.djvu/363

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

ble détonation le suivit de près : la cabane trembla, et une poutre tomba en dehors.

— Oh ! eh ! la maison ! s’écria le buveur ; le diable est chez nous ! les amis ne viennent donc pas ?

— Chantons, dit Jacques en rapprochant le bât sur lequel il était assis de celui de Houmain.

Celui-ci but pour se raffermir, et reprit :

 
Jaleo ! jaleo ! mon cheval est fatigué ! et moi je marche en courant près de lui.
Aï ! aï ! aï ! la ronde vient et la fusillade s’élève dans la montagne,
Aï ! aï ! aï ! mon petit cheval, tire-moi de ce danger.
Vive ! vive mon cheval ! mon cheval qui a le chanfrein blanc !
Jeunes filles, jaleo ! jeunes filles, achetez-moi du fil noir !


En achevant il sentit son siége vaciller, et tomba à la renverse ; Jacques, après s’en être débarrassé ainsi, s’élançait vers la porte, lorsqu’elle s’ouvrit, et son visage se heurta contre la figure pâle et glacée de la folle. Il recula.

— Le juge ! dit-elle en entrant.

Et elle tomba étendue sur la terre froide.

Jacques avait déjà passé un pied par-dessus elle ; mais une autre figure apparut, livide et surprise, celle d’un homme de grande taille, couvert d’un manteau ruisselant de neige. Il recula encore, et rit d’horreur et de rage. C’était Laubardemont suivi d’hommes armés ; ils se regardèrent.

— Eh ! eh ! ca…a…ma…ra…de coquin ! dit Houmain, se relevant avec peine, serais-tu royaliste, par hasard ?

Mais lorsqu’il vit ces deux hommes qui semblaient


    ay ! ay ! que viene la ronda,
    y se mueve el tiroteo ;
    ay ! ay ! cavallito mio,
    ay ! saca me deste aprieto.

    viva, viva mi cavallo,
    cavallo mio carreto :
    ay ! jaleo ! muchachas, ay ! jalo…