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hara-kiri

acharné contre les pauvres gens qui vivent de l’amour et que, d’autre part, eux-mêmes s’abandonnent au mépris public, baissent la tête et, ayant même que le coq n’ait chanté, renient leur métier, et peut-être en médisent. Pourtant, ce métier, qu’on a coutume de considérer comme abject, en vaut à tout prendre un autre. Il me sera facile de le démontrer.

» D’abord, il est nécessaire de distinguer. Il y a deux classes d’alphonses, d’après leur façon d’exploiter l’amour. Les uns sont souteneurs de filles — ce sont les plus méprisés — les autres sont entretenus par une femme riche. Procédons par ordre, et, parlant des souteneurs de filles, jetons, comme disent les orateurs solennels, un coup d’œil sur l’histoire :

» Abraham fut un grand alphonse devant l’Éternel. C’est la Bible, que révèrent les peuples civilisés, qui lui donne ce titre, avec beaucoup d’autres. Sur le point d’entrer en Égypte, disent les saintes Écritures, il tint à sa femme, la belle Sara, ce raisonnement judicieux :

» — Le roi de ce pays, qui est un fameux paillard, ne manquera pas de te trouver belle et de te désirer. S’il sait que tu es ma femme, il me tuera sans doute pour te ravir. Tandis que si tu passes pour ma sœur, il trouvera tout simple de te prendre et, même, me comblera de cadeaux en échange.