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Page:Allais - À l’œil.djvu/193

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L’avenue ensoleillée par un essai timide de printemps de mars, un petit printemps gentil qui vous sourit, disparaît, revient avec des airs de dire : Bonjour, c’est moi… À tout à l’heure, je reviens.

Un petit printemps qui vous fait paraître plus moroses les derniers jours gris et plus désolantes les giboulées.

Donc elle passa, traversant l’avenue, une lettre à la main, une lettre qu’elle portait à la poste.

Postes et Télégraphes !

J’ai vu bien des femmes de chambre.

J’en ai aimé davantage.

Mais jamais je n’en rencontrerai une plus accorte.

Oh ! sa tête de bébé ingénu, frisons qui s’envolent, dégageant de leur or clair le jeune ivoire du front.

Oh ! sa poitrine, sa poitrine triomphale, trop forte pour une jeune femme de chambre.

Non ! pas trop forte ! Jamais trop forte !

Ah ! le grand personnage, le bien grand personnage que j’allais voir ! Ah ! mon avenir !

À nous la petite femme de chambre, qui traverse l’avenue, dans le clair du soleil, avec une lettre à la main !

À nous, à nous !