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Page:Allais - À l’œil.djvu/58

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homme peu amateur de manifestations populaires, était parti la veille à la campagne, défendant expressément à son concierge d’introduire qui que ce fût sur le balcon, le jour des funérailles.

Dès le matin de l’enterrement, le balcon du bonhomme était bondé de gens à un louis la place, les personnes âgées par devant, les plus jeunes par derrière,

Gustave et Léa, la main dans la main, s’aimant bien, se tenaient pressés l’un contre l’autre, les yeux noyés de bonheur extatique.

L’appartement à la fenêtre duquel ils se trouvaient était un petit cabinet de travail, richement meublé. Dans un coin, un coffre-fort énorme, lourd, massif et comme endormi dans son opulence bête.

Le regard des amants, à plusieurs reprises, s’était rencontré sur le meuble métallique et fascinateur.

Ah !… si c’était à eux, ce coffre-fort et son contenu, rien ne s’opposerait à leur bonheur.

Décidément, le convoi tardait bien à venir. Les discours probablement qui s’étaient prolongés… On voyait bien des escouades de sergents de ville, des pelotons de gardes républicains, beaux et graves sur leurs chevaux qui paraissaient prendre part au deuil public.