Aller au contenu

Page:Allais - L’Arroseur.djvu/44

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
42
L’ARROSEUR

Inutile donc d’avoir des rues si longues ! Alors, quoi !… D’une rue nous en avons fait deux. Et voilà !

Évidemment, c’est très simple, mais encore fallait-il y penser.

D’autres choses nouvelles me frappèrent encore dans cette admirable ville américaine de Hotcock-City.

C’est surtout ces mille robinets dans les appartements qui m’intriguèrent beaucoup.

Robinet pour l’eau froide, robinet pour l’eau chaude, cela se trouve dans les plus sordides coins de la miasmatique et purineuse Europe.

Mais le robinet à air froid ! Voilà du nouveau. Avez-vous trop chaud dans votre chambre ? Un simple tour de clef, et un air frais vous inonde jusqu’à ce que vous ayez obtenu la température qui vous sied.

Tant que je n’en connus pas l’emploi, un petit robinet marqué J.-C. m’énigmatisa beaucoup.

J.-C. ! Jésus-Christ, pensai-je d’abord, un instant.

Mais non ! On a mis le Christ à bien des sauces plus ou moins à l’abbé Chamel, mais à propos de quoi songerait-on à le canaliser ?

J.-C. ! Jules Claretie, peut-être ? Serait-ce point le fameux robinet par où fluèrent tous les impérissables chefs-d’œuvre de Jules Claretie, empreints d’un cachet si personnel et tant inoubliable ?

J’en étais là de mes réflexions quand William H.-K. Canasson pénétra dans mon room.

— Ah ! vous avez envie d’un John Collins ! Excellente idée ! Prenons un John Collins ! Tout à fait fameux pour le… Wooden mouth ! Comment dites-vous en français ?

— Ça dépend ! Le docteur Héricourt dit xylostome, les voyous prononcent gueule de bois.

Pendant cette courte explication, Canasson, tournant le robinet J.-C., avait rempli deux grands verres d’un liquide