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Page:Alma - L'aviateur inconnu, 1931.pdf/11

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L’AVIATEUR INCONNU

— Allons bon ! exclama Bergemont aîné, voilà une nouvelle lubie !

— Ce n’est pas une lubie, c’est une excellente idée que je caresse depuis longtemps, affirma son frère, j’ai la plus déférente estime pour les champions de l’air, je suis convaincu que leurs exploits préparent au monde un immense avenir et je souhaite ardemment, je le répète, qu’Elvire partage assez mon sentiment pour me donner un gendre choisi parmi ces héros !

— Félix, tu bats la campagne !

— En aucune façon !

Elvire, qui venait d’entrer, n’avait entendu que les derniers mots. Elle demanda en souriant :

— Qu’y a-t-il encore de cassé ? Pourquoi mon oncle accuse-t-il mon père de battre la campagne ?

— Ah ! ma chère enfant, dit Tristan, tu n’auras jamais occasion plus légitime de prendre part à nos échanges de vues. Car, cette fois, c’est toi-même qui es en cause, c’est de toi qu’il s’agit ! Écoute et prépare-toi à rire ! Félix l’interrompit :

— Mais pas du tout, Elvire ne rira pas ! Elvire com­prendra toute la hauteur de ma pensée !

— Ah ! ma foi, j’en conviens, c’est une pensée haute ! ricana l’oncle Tristan ; ton père, ma pauvre petite, ton père veut te marier… devine à qui !

La jeune fille, saisie, devint toute rouge. Si les deux frères n’eussent été entièrement absorbés dans leur discus­sion, ils se fussent peut-être avisés de cette rougeur et surtout de l’expression de crainte et d’espoir mêlés qui passa sur la physionomie d’Elvire. Mais ni l’un ni l’autre n’était en veine de perspicacité… Goguenard, l’oncle insista :

— Devine un peu, cherche… Je te le donne en cent !

— Je n’ose comprendre… commença Elvire.

— N’essaye pas, cela dépasse l’imaginable ! Ton père ma petite Elvire, ton père veut que tu épouses un avia­teur !

— Comment, un aviateur ? fit la jeune fille stupéfaite.

— Oui, un champion de l’air, un pionnier de l’espace, et patati et patata ! Tel est le serment de ce moderne Jephté !

Bergemont cadet, en entendant ces paroles, piétinait de