surmonté d’une grille légère. Mlle Bergemont contourna la pelouse, entra dans un massif de troènes et se trouva contre la grille. De l’autre côté, une ombre accourut.
— Bonsoir, Jean-Louis, prononça la jeune fille.
— Bonsoir, Elvire chérie ! Je commençais à craindre de ne pas vous voir… Il est dix heures et demie bien sonnées !
— Nous avons dîné tard, à la suite d’une histoire ridicule, mais qui n’est pas sans me tourmenter un peu. Figurez-vous…
Elle relata la dispute des frères Bergemont, la part qu’elle y avait prise, puis la brusque fantaisie de son père, et, tout d’abord, le peintre s’en amusa fort.
— Un aviateur ! Mais c’est un choix très rassurant. Songez que M. Bergemont aurait très bien pu vous désigner un scaphandrier ou quelque chose dans ce genre ! Avec lui, on doit s’attendre à tout.
— Justement, c’est cela qui m’inquiète !
— Pourquoi donc, Elvire ?
— Parce qu’il faut compter avec son opiniâtreté contre laquelle nul ne peut rien !
— Oh ! pas en pareille occurrence, voyons ! Je conçois très bien que sa plaisanterie vous ait froissée, surtout s’il l’a un peu trop appuyée, mais vous n’allez pas prendre à la lettre des propos aussi saugrenus ! Épouser un aviateur !… Mais c’est une farce, pas excellente, j’en conviens mais une farce tout de même et que votre père aura oubliée demain !
— Je ne suis pas de votre avis, repartit la jeune fille, je crois au contraire qu’il y songera demain avec plus de force et que chaque jour enfoncera en lui cette idée fixe. Elle s’exprimait d’une manière si positive que Jean-Louis en fut impressionné. Quittant le ton badin, il prononça :
— Votre père n’a rien d’un barbare, il ne vous forcera jamais — d’ailleurs, le temps de ces violences est passé ! — à vous marier contre vos goûts. Mais supposons qu’il se mette à recruter des aviateurs et vous les présente et vous importune, vous serez toujours libre de les décourager l’un après l’autre !
— Assurément, Jean-Louis, aussi n’est-ce pas cela qui m’effraye ! Je n’ai pas peur de céder aux instances de papa,