— Singulière idée, entre nous, de publier cette histoire dans les journaux, interrompit le peintre.
— Oui, mais c’est fait, n’en parlons plus… Et, de l’autre côté, vous-même qui avez pour vous la garantie d’une présence permanente, mais, qui, en revanche, permettez-moi de vous le dire, n’avez plus le prestige du mystère !
— Peste ! voilà une condamnation en bonne forme ! prononça Jean-Louis avec un sourire railleur qui eut pour résultat d’exaspérer Flossie.
— Félicitez-vous, reprit-elle, qu’Elvire ne soit pas romanesque… sans quoi l’inconnu pourrait très bien vous… comment dit-on en français ?… vous damer le pion ! Cette attaque brusquée ne fut pas du goût d’Elvire. Elle déclara, un peu froissée :
— Je t’en prie, Flossie, ne me prête pas, même par hypothèse, une irrésolution que je ne saurais avoir. Je persiste à considérer l’aviateur qui me harcèle comme un indiscret, un plaisantin détestable. Nous sommes, Jean-Louis l’a fort bien dit, dans l’incapacité absolue de le rappeler à l’ordre, nous ne pouvons que ronger notre frein… il n’y a rien à faire !
— Pourtant, Elvire, fit Jean-Louis, Mademoiselle votre tante vient de parler avec une telle vivacité que je suis fondé à éprouver quelque crainte. Se pourrait-il que l’aviateur inconnu vous eût touché par son empressement ?
Il aurait dû poser cette question avec une certaine appréhension, un certain trouble, puisqu’il s’agissait de son bonheur. Mais non, sa voix restait posée, son regard tranquille, voire malicieux. Flossie en fit soudain la remarque.
— Jean-Louis, dit Elvire avec force, je vous jure que les déclarations de ce despotique visiteur me contrarient au plus haut point. Je veux, d’ailleurs, vous rassurer pleinement, mon ami : vous savez que mon père a juré de me donner un aviateur pour mari… Eh bien, moi, je fais à mon tour le serment de ne jamais épouser un aviateur !
— Ah ! Merci, Elvire ! s’écria le peintre, je sais que je peux avoir foi en vous… Je suis rassuré ! quoi qu’il arrive !
Cette explosion de contentement eut pour conséquence de déterminer chez Flossie une vive surprise. Elle ne put s’empêcher de penser : « Il ne lui en faut pas beaucoup à ce garçon pour se sentir délivré de souci ! Un autre à sa