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Page:Alphonse de Candolle - Origine des plantes cultivées, 1883.djvu/22

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MÉTHODES POUR DÉCOUVRIR L’ORIGINE DES ESPÈCES

bliés. Je dois de sincères remerciements pour des informations de ce genre que j’ai reçues de M. C. B. Clarke sur les plantes de l’Inde, de M. Boissier sur celles d’Orient, de M. Sagot sur les espèces de la Guyane française, de M. Cosson sur celles d’Algérie, de MM. Decaisne et Bretschneider sur les plantes de Chine, de M. Pancic sur des céréales de Servie, de MM. Bentham et Baker sur des échantillons de l’herbier de Kew, enfin de M. Édouard André sur des plantes d’Amérique. Ce zélé voyageur a bien voulu me prêter des échantillons très intéressants d’espèces cultivées dans l’Amérique méridionale, qu’il a recueillis avec toutes les apparences de végétaux indigènes.

Une question plus difficile, qu’on ne peut pas résoudre sur le terrain, est de savoir si une espèce bien spontanée, ayant toutes les apparences des espèces indigènes, existe dans le pays depuis un temps très reculé ou s’y est introduite à une époque plus ou moins ancienne.

Il y a, en effet, des espèces naturalisées, c’est-à-dire qui s’introduisent parmi les anciennes plantes de la flore et s’y maintiennent, quoique d’origine étrangère, au point que la simple observation ne permet plus de les distinguer et qu’il faut pour cela des renseignements historiques ou des considérations de pure botanique ou géographie botanique. Dans un sens très général, en tenant compte des temps prolongés dont la science est obligée de s’occuper, presque toutes les espèces, surtout dans les régions hors des tropiques, ont été naturalisées une fois, c’est-à-dire qu’elles ont passé d’une région à une autre, par l’effet de circonstances géographiques et physiques. Lorsque j’ai émis l’idée, en 1855, que des conditions antérieures à notre époque ont déterminé la plupart des faits de la distribution actuelle des végétaux, — c’était l’expression de plusieurs des articles et la conclusion de mes deux volumes sur la géographie botanique[1], — on a été quelque peu surpris. La paléontologie venait bien de conduire, par des vues générales, un savant allemand, le Dr Unger, à des idées analogues[2], et, avant lui, Édouard Forbes avait émis, pour quelques espèces du midi des îles britanniques, l’hypothèse d’une ancienne contiguïté avec l’Espagne[3]. Mais, la preuve donnée, pour l’ensemble des espèces actuelles, de l’impossibilité d’expliquer leurs habitations au moyen des conditions qui existent depuis quelques milliers d’années, a produit plus d’impression, parce qu’elle était davantage dans le domaine des botanistes et qu’elle ne concernait pas quelques plantes, d’un seul pays. L’hypothèse proposée par Forbes, devenue dès lors

  1. Alph. de Candolle, Géographie botanique raisonnée, chap. X, p. 1055 ; chap. XI, XIX, XXVII.
  2. Unger, Versuch einer Geschichte der Pflanzenwelt, 1852.
  3. Forbes, On the connexion between the distribution ofthe existing fauna and flora of the british isles with the geological changes which have affected their area, in-8, dans : Memoirs of the geological survey, vol. 1, 1846.