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LES AVENTURIERS DE LA MER


et les jeunes filles, suivant la vieille coutume de leur pays, célébraient les réjouissances de mai, le joli mois des fleurs. Elle surprit les populations maritimes des trois préfectures de Miyagi, d’Iwocté et d’Aomori, apportant partout en ce charmant pays la ruine et la mort.

Il y eut, à sept heures un quart du soir, un soulèvement du sol au fond de la mer, à quelque distance des côtes, marqué par un sourde détonation. Presque aussitôt une énorme masse d’eau fut projetée sur le littoral, envahissant une étendue de cent cinquante kilomètres de côtes. Une épouvantable vague, haute de trente mètres, se répandit dans le pays, s’avançant avec fracas, brisant et balayant sur son passage tout ce qui se trouvait dans les plaines, dans les vallées, roulant avec elle les débris des maisons et les cadavres des habitants.

La montagne d’eau fit de la sorte cinq kilomètres dans l’intérieur, puis se retira : quelques minutes après, la mer rentrait dans son lit. Mais ces quelques minutes avaient suffi pour anéantir et emporter tout ce que le raz de marée avait pu atteindre.

La mer avait tué vingt-neuf mille personnes, elle en avait blessé huit mille, elle avait détruit huit mille maisons, elle avait brisé ou englouti dix mille navires et barques de pêcheurs… D’une région peuplée, fertile et laborieuse, elle avait fait un désert.

Dans la ville de Kamaïshi, où il y avait huit mille habitants, on compta cinq mille morts ; trois maisons seulement résistèrent au cataclysme ! Des scènes d’horreur ont été rapportées par les survivants qui, placés ou réfugiés sur les hauteurs, ont pu assister à cette œuvre effroyable de destruction.

Comme toujours en pareil cas, il y eut des sauvetages véritablement miraculeux. On raconte qu’un berceau fut retrouvé sur les branches d’un arbre, un berceau dans lequel souriait une petite fille de trois ans, seule survivante d’un village de plusieurs centaines d’habitants…

Des pêcheurs qui se trouvaient au large lorsque le cataclysme se produisit, ne s’en doutèrent pas ; ils entendirent seulement au loin, vers la terre, un bruit inusité ; mais lorsqu’ils rentrèrent au port, ils ne retrouvèrent ni port, ni maison, ni famille, rien… D’autres pêcheurs, en revenant, pêchèrent des corps entraînés au large par la vague. L’un de ces hommes retrouva ainsi, dit-on, le cadavre de son enfant.