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Page:Anatole France - La Rôtisserie de la reine Pédauque.djvu/133

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Il ne faut pas qu’on vous voie. Tout à l’heure en passant sur le Cours, je vous ai vu chez le limonadier. Aussitôt je vous ai fait quérir par le bon frère, que j’ai pris pour les exercices du carême et que je garde près de moi depuis ce temps, car, dans quelque condition où l’on se trouve, il faut avoir de la piété. Vous aviez très bonne mine, monsieur Jacques, devant votre petite table, l’épée en travers sur les cuisses, avec l’air chagrin d’un homme de qualité. J’ai toujours eu de l’amitié pour vous, et je ne suis pas de ces femmes qui, dans la prospérité, méprisent les amis d’autrefois.

— Eh ! quoi ? mam’selle Catherine, m’écriai-je, ce carrosse, ces laquais, cette robe de satin…

— Viennent, me dit-elle, des bontés de M. de la Guéritaude, qui est dans les partis, et des plus riches financiers. Il a prêté de l’argent au Roi. C’est un excellent ami que, pour tout au monde, je ne voudrais fâcher. Mais il n’est pas si aimable que vous, monsieur Jacques. Il m’a donné aussi une petite maison à Grenelle, que je vous montrerai de la cave au grenier. Monsieur Jacques, je suis bien contente de vous voir en état de faire votre fortune. Le mérite se découvre toujours. Vous verrez ma chambre à coucher, qui est copiée