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Page:Anatole France - La Rôtisserie de la reine Pédauque.djvu/146

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découvrit la Salamandre. Cet homme ignorant et grossier s’imagina qu’une si merveilleuse créature était l’œuvre du diable. D’épouvante, il la jeta à la mer. Mais vous pensez bien que cette belle personne ne s’y noya pas, et qu’il lui fut aisé de rejoindre son bon ami M, Descartes. Elle lui demeura fidèle tant qu’il vécut et quitta cette terre à sa mort pour n’y plus revenir.

» Je vous cite cet exemple, entre beaucoup d’autres, pour vous faire connaître les amours des philosophes et des Salamandres. Ces amours sont trop sublimes pour être assujetties à des contrats; et vous conviendrez que l’appareil ridicule qu’on déploie dans les mariages ne serait pas de mise en de telles unions. Il serait beau, vraiment, qu’un notaire en perruque et un gros curé y missent le nez ! Ces messieurs sont propres seulement à sceller la vulgaire conjonction d’un homme et d’une femme. Les hymens des Salamandres et des sages ont des témoins plus augustes. Les peuples aériens les célèbrent dans des navires qui, portés par des souffles légers, glissent, la poupe couronnée de roses, au son des harpes, sur des ondes invisibles. Mais n’allez pas croire que pour n’être pas inscrits sur un sale registre