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Page:Anatole France - La Rôtisserie de la reine Pédauque.djvu/194

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j’étais injurié et vitupéré en manière de chant ou de cantilène. Et sans me flatter, mon fils, je puis dire que je fus traité de paillard et de suborneur sur un ton solennel et cérémonieux. Quand ce Mosaïde fut au bout de ses imprécations, je m’étudiai à lui faire une riposte bilingue, comme l’attaque. Je lui répondis en latin et en français qu’il était homicide et sacrilège, ayant égorgé des petits enfants et poignardé des hosties consacrées. Le vent frais du matin, en glissant sur mes jambes, me rappelait que j’étais en chemise. J’en éprouvai quelque embarras, car il est évident, mon fils, qu’un homme qui n’a point de culotte est en mauvais état pour faire paraître les sacrées vérités, confondre l’erreur et poursuivre le crime. Toutefois, je lui fis des tableaux effroyables de ses attentats et le menaçai de la justice divine et de la justice humaine.

— Quoi ! mon bon maître m’écriai-je, ce Mosaïde, qui a une si jolie nièce, égorgea des nouveau-nés et poignarda des hosties ?

— Je n’en sais rien, me répondit M. Jérôme Coignard, et n’en puis rien savoir. Mais ces crimes lui appartiennent, étant ceux de sa race, et je puis les lui donner sans injure. Je poursuivais sur ce mécréant une longue suite